L'établissement d’une colonie et d’une industrie de pêche néces- site d'importants investissements. Il faut se procurer des bateaux de transport et de pêche, défrayer les coûts de transport des colons, embaucher des administrateurs, faire construire sur les lieux des édifices pour le logement, pour le culte et ainsi de suite. Afin de recueillir les sommes nécessaires, le comte de Saint-Pierre fonde la Compagnie de l’Isle Saint-Jean grâce à laquelle il réussit à intéresser quelques riches spéculateurs/. Il recrute ensuite quelque 300 colons et pêcheurs prêts à tenter l’expérience du Nouveau Monde. Le 15 avril 1720, ce groupe quitte Rochefort à bord de trois navires sous le commandement de Gotteville de Bellisle, employé de la Compa- gnie de l’Isle Saint-Jean. Après une traversée de quatre mois, ces colons accostent le 23 août à Port-Lajoie alors que d’autres, surtout des pêcheurs, se rendent sur la côte nord, à Havre-Saint-Pierre, qui deviendra le principal centre de pêche et l’établissement le plus peuplé de la colonie. Dès cette première année de peuplement, quelques familles acadiennes se joignent aux colons nouvellement arrivés de France.

La Compagnie de l’Isle Saint-Jean connaît peu de succès dans ses entreprises. Le comte de Saint-Pierre, qui n’a jamais visité l’île et qui espérait amortir ses investissements par les bénéfices retirés de la pêche à la morue, se heurte à toutes sortes d’obstacles. Bien qu’il ait obtenu les droits de pêche exclusifs au large de ses îles, il ne réussit pas à faire respecter ce monopole par les pêcheurs de l’île Royale, employés par des négociants français. Ces derniers contes- tent farouchement ce monopole qu’ils estiment contraire à leurs propres intérêts et à ceux de la France. Fort endettée et incapable de rentabiliser la colonie, la Compagnie de l’Isle Saint-Jean cesse son activité à la fin de 1724. L’année suivante, Louis XV retire au comte de Saint-Pierre ses droits de pêche. Le départ de la Compagnie incite de nombreux colons et pêcheurs à immigrer à l’île Royale ou à retourner en France.

Colonisation et développement : 1726-1745

Après le départ de la Compagnie de l’Isle Saint-Jean, la France s’inquiète de la sécurité du territoire. En effet, selon certaines rumeurs, les Anglais se prépareraient à y prendre pied. Le gouver- nement français ordonne donc au gouverneur de Louisbourg d’en- voyer dans l’île un détachement armé d’une trentaine de fusiliers marins chargé d’y confirmer la souveraineté française. La petite

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