troupe, commandée par Jacques d’Espiet de Pensens, débarque à l’île Saint-Jean au printemps de 1726 et prend ses quartiers à Port- Lajoie dans les anciens bâtiments délabrés laissés par la Compagnie de l’Isle Saint-Jean. Jacques d’Espiet de Pensens, officier expéri- menté, est un vétéran du service dans les colonies de la Nouvelle- France.
À cette époque, la population reste clairsemée. En 1728 on n’y compte que 297 résidents permanents et quelque 125 pêcheurs saisonniers ; en tout, 54 maisons où vivent 76 hommes, 51 femmes, 156 enfants et 14 domestiques.
Les autorités françaises souhaitent toujours amener les Acadiens à s'établir à l’île Saint-Jean, surtout les jeunes ménages”. À cette fin, le commandant de Pensens sollicite l’appui et l’approbation du ministre de la Marine, responsable des colonies françaises. Pour attirer les colons acadiens, il faut à son avis leur fournir une aide financière au cours des premières années du défrichage. De Pensens est convaincu qu’un tel investissement serait rentable, dans la mesure où l’île pourrait devenir «l’entrepôt» éventuel de l’île Royale.
Les Acadiens hésitent cependant à passer dans cette colonie insulaire, surtout parce qu’ils craignent que la Compagnie de l’Isle Saint-Jean revienne réclamer ses droits et exiger des redevances des colons. Les habitants déjà installés éprouvent la même incertitude face à cette situation. Voici ce que de Pensens confie au ministre en 1728 :
Les habitants sont fort inquiets sur ce que je ne leur donne nulle assurance pour leurs terrains. Ils m’ont pressé plusieurs fois à ce sujet. J’ay taché de les rasseurer de mon mieux, en leur disant qu’ils n’ont rien à craindre de la part de monsieur le comte de St. Pierre, et qu’ils doivent estre certains que jamais il ne les inquiétera à l’isle St. Jean.…!°
Afin de mieux rassurer les Acadiens, de Pensens et le gouver- neur de l’île Royale, Saint-Ovide de Brouillan, insistent auprès du gouvernement français pour que les lettres patentes du comte de Saint-Pierre soient révoquées et que l’île soit réunie au domaine royal. Cela se réalise finalement en 1730. Malgré la révocation des titres, il n’y aura pas d’immigration massive. Au contraire, quelques familles acadiennes seulement se déplacent — et encore à un rythme très lent.
Les Acadiens sont profondément attachés à leurs terres qu’ils cultivent depuis quelques générations. Ils ont réussi à maîtriser leur
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