Rustico, mon cheflieu est sur le point d’être abandonné des Acadiens. Je ne doute pas [...] que dans peu de tems tous les habitants seront obligés de laisser l’endroit. La rente qu’ils ne peuvent pas maintenant payer au lieu de diminuer ne fait qu’augmenter. Ils seront dès ce printemps en bonne partie obligés d’aller au Labrador [Lac Bras d’Or] du Cap Breton où Mr. Gaulin leur a assuré qu’ils trouveraient du terrain du roi. Ceux qui resteront se trou- vant environnés, et mêlés avec des peuples de différentes nations, suivront le parti du premier. Au début septembre de la même année, le Père Cécile, dans une autre lettre à Mgr Plessis, lui fait savoir que 36 familles de Rustico se préparent à passer au Cap-Breton??. Ce courant migra- toire semble durer plusieurs années, car nous savons que cinq autres familles de Rustico se fixent à l’île du Cap-Breton en 1829*. Malgré l’appréhension du Père Cécile, le gros de la population de Rustico ne bouge pas. Quelques privilégiés réussissent à acheter leurs terres tandis que la plupart demeurent locataires, souvent endettés envers le propriétaire. La situation empire avec chaque génération. À mesure que les terres sont divisées pour faire place aux jeunes familles, les fermes deviennent de plus en plus petites. Il en résulte des exploitations agricoles où il est bien difficile de vivre convenablement. Vers 1860, la situation devient très critique à Rustico. Comme nous verrons, l’arrivée du Père George-Antoine Belcourt dans cette paroisse, en 1859, sera providentielle. Malpèque Nous ne savons pas exactement où, autour de la baie de Malpèque, se rétablissent les Acadiens après la Déportation. Il est possible que ce soit dans le lot 18, aux environs du village actuel de Malpèque. Effectivement, des familles acadiennes s’y trouvent en 1770 puisqu'elles recueillent les naufragés du navire Annabella, immigrants en provenance de l’Écosse*!. La même année, le premier gouverneur, Walter Patterson, met pied sur l’île. Il se trouve co- propriétaire du lot 19 et devient aussi l’agent du propriétaire du canton 17°. Il invite alors les Acadiens, probablement ceux du lot 18 et d’ailleurs, à s’établir dans les lots où il possède des intérêts Plus tard, quelques familles acadiennes s’établissent dans le lot 16, toujours sur le littoral de la baie de Malpèque. On ne sait pas dans quelles conditions les Acadiens déménagent dans ces lots, mais il est tout à fait possible qu’ils soient devenus locataires presque immédiatement** 58