l’église, même en l’absence du prêtre. Ils y entendent la «messe blanche» et les vêpres. Il n’y a pas de consécration mais un des hommes les plus instruits et les plus respectés de la paroisse préside à la lecture des prières de la messe. L’absence de prêtres pour bapti- ser les nouveau-nés est une réalité presque quotidienne à l’époque. L'Eglise permet néanmoins aux laïcs d’ondoyer les bébés en danger de mort, quitte à suppléer aux cérémonies du baptême par le prêtre à la première occasion, parfois dix, douze ans plus tard. Nous avons vu ailleurs qu’en 1785, l’évêque de Québec, forcé par les circons- tances, accorde à Jean Doucet, de Rustico, les pouvoirs de baptiser et de recevoir les consentements de mariage en l’absence de prêtres. Lorsqu'un missionnaire se trouve dans une localité assez voisine, on n’hésite pas à aller le trouver pour recevoir les sacrements. Les gens de Tignish, à titre d’exemple, se rendent parfois jusqu’à Rustico, à une distance d’environ 160 kilomètres, pour y recevoir la béné- diction nuptiale ou pour faire baptiser leurs enfants. Le missionnaire a une mission très contraignante qu’il remplit dans l’isolement, loin de ses supérieurs ecclésiastiques : administrer les sacrements, enseigner le catéchisme, organiser des écoles et l’enseignement, diriger les affaires matérielles de la paroisse, faire souvent fonction de juge de paix, combattre les problèmes sociaux tels que l’ivrognerie, et quoi encore! Tout cela, il s’en charge dans chacune de ses missions. Face à la situation dans laquelle vivent les Acadiens de l’époque, les missionnaires trouvent difficile de faire observer à la lettre certains règlements de l’Église. À titre d'exemple : un couple qui désire se marier, mais qui est lié par un degré de parenté, ou une filiation quelconque, doit obtenir de l’évêque une dispense spéciale et aussi lui payer un certain droit dont le montant varie selon le degré de parenté. Considérant le nombre restreint d’Acadiens dans l’île, et leur rassemblement en quelques petites communautés isolées, on ne peut guère s’étonner des liens de consanguinité qui les unissent. Les missionnaires doivent souvent faire face à ce problème. L’abbé de Calonne explique la situation particulière de ses fidèles à Mgr Plessis, en 1800, pour lui demander une plus grande souplesse dans l'attribution des dispenses : J'ai déjà eu l’honneur je crois d’observer à votre Grandeur que nous avons ici trois établissements d’Acadiens l’un à Malpèque l’autre à Rasticot et le troisième à la baie de Fortune. Ces établissements ont été faits en chaque endroit par deux ou trois familles qui se sont beaucoup propagées, mais sans 81