premier prêtre acadien de l’île, le Père Sylvain-Ephrem Poirier, prend sa retraite en 1879 ; un an auparavant un deuxième Acadien est ordonné. Il s’agit du Père Jean Chiasson, de Tignish. En 1884, ce sera au tour de l’abbé François-Xavier Gallant, de Rustico, d’être admis au sacerdoce. Il faut noter aussi que pendant cette période, quelques prêtres d’origine écossaise, en général parfaitement bilin- gues, sont postés dans des paroisses à prédominance acadienne!* Beaucoup de ces prêtres contribuent remarquablement au déve- loppement des communautés acadiennes. Grâce à leur position privi- légiée dans la société, à leur dynamisme et à leur sens de l’orga- nisation et de l’animation, ils jouent un rôle de premier plan dans la renaissance acadienne. Nous avons noté que le prêtre a demeuré longtemps le seul membre de la communauté à avoir acquis une éducation formelle. Les Acadiens voient donc en lui le confident capable de les protéger contre tout élément hostile. Considéré comme le représentant de Dieu sur la terre, il symbolise dans sa personne l’autorité et la justice. Aussi peut-on lire en 1868 ces lignes de la plume d’un Acadien dans le Summerside Progress : Les Acadiens sont pacifiques de nature et fort attachés à la religion de leurs ancêtres, la religion catholique. Ils vénèrent grandement leur clergé auquel ils témoignent une confiance absolue. ! Ce respect sans bornes du prêtre est longtemps prôné par l’Église. En effet, cette période de la renaissance acadienne coïncide avec la montée de l’ultramontanisme dans l’Église catholique canadienne- française. Il s’agit d’une idéologie très conservatrice qui prône la soumission des fidèles à toute forme d’autorité, : compris celle du clergé. D’après cette doctrine, l’Église, par sa mission divine, détient l’autorité non seulement au niveau spirituel, mais aussi dans tous les domaines de la vie temporelle. L’ultramontanisme encourage la vie rurale et traditionnelle, voyant dans l’urbanisme et l’industria- lisation une menace à la religion. L’ultramontanisme souligne donc fortement les mérites de l’agriculture et de la colonisation. Enfin, les tenants de cette doctrine associent de très près la culture cana- dienne-française à la religion catholique, d’où l’expression «qui perd sa langue perd sa foi». L’idéologie ultramontaine marque profondément les Acadiens qui reçoivent les services d’un clergé formé à cette école de pensée. Jouissant d’un statut spécial dans la communauté, le prêtre peut y 103