exempts de références religieuses. Quand les directives du Bureau ne sont pas observées à la lettre dans certaines écoles, les autorités ferment les yeux sur ces irrégularités tant et aussi longtemps que ne s’élèvent pas des conflits dans les districts concernés. Comme nous l’avons vu, les écoles acadiennes, tout en recevant des octrois du Trésor provincial, jouissent d’un statut spécial dans la mesure où les prêtres sont autorisés à certifier la compétence des instituteurs, obligatoirement catholiques. En outre, le clergé choisit de préférence les manuels scolaires présentant un contenu religieux. Mais le débat religieux qui s’enflamme à partir de 1856, suite à l’ouverture officielle de l’École normale à Charlottetown, amène les journaux protestants, et plus tard, les Orangistes, à critiquer ouvertement le privilège dont jouissent les écoles acadiennes. Ils demandent au gouvernement de cesser de favoriser ces écoles confessionnelles®. Ils demandent aussi pourquoi le gouvernement subventionne l’enseignement en français aux Acadiens. Dans le journal The Islander on peut lire : Nous répliquons que les habitants français de cette île n’ont pas le droit de s’attendre à être instruits dans la langue française — ils n’ont aucun droit à revendiquer auprès du gouvernement — ils sont les descendants de prisonniers de guerre qui se sont enfuis dans les bois de cette île et des provinces voisines. [...] Sous prétexte de politique nationale, nous nous objectons à encourager les écoles françaises.…** En raison de ces critiques, la loi scolaire subira des modifications avec d’importantes répercussions sur les écoles acadiennes. En 1860, un amendement oblige les enseignants acadiens à subir les examens du Bureau d’Éducation pour obtenir un certificat. S’ ils refusent de se soumettre leur salaire est réduit de 40 à 35 livres”. Trois ans plus tard, un autre amendement abolit la catégorie des enseignants acadiens. Cela veut dire que les instituteurs acadiens ont dorénavant le même statut que les autres instituteurs de l’île et que les privilèges, jusque-là accordés aux écoles acadiennes, sont éliminés. En prin- cipe, donc, les écoles acadiennes cessent d’exister. En effet, un instituteur dans une école acadienne peut être de n'importe quelle religion, il n’a plus besoin de démontrer sa capacité à enseigner en français et il doit fréquenter l’École normale, école où la formation pédagogique se donne entièrement en anglais. La loi scolaire est muette, toutefois, au sujet de la langue d’enseignement dans les écoles acadiennes; on peut donc continuer à enseigner en français. La situation est paradoxale : pour obtenir un brevet d’enseignement, 111