Méfions-nous des fausses promesses qui nous sont faites. N'oublions pas que nous avons déjà été honteusement trahis par ces mêmes moyens. L’insulte qui nous a été faite en nommant un français au poste de commissaire des chemins et en le remplaçant ensuite par un autre personnage qui n’y avait aucun droit, et donnant pour raison qu’il n’y avait pas un français digne de la position ; cette insulte, nous en sommes certain, est encore vivace dans la mémoire de chacun de nous. Le temps de la revanche est arrivée. À nous de nous en servir et de prouver une fois pour toutes, à ces gens qui n’ont aucune sympathie pour nous, que nous sommes fatigués de leurs tours de finesse et de duplicité. Montrons-nous à la hauteur de la circonstance, en répudiant ces cabales honteuses et indignes de tout honnête homme qui nous sont faites pour nous pervertir, et semer la haine et la discorde parmi nous. 2 Gilbert Buote est sans doute un des plus farouches défenseurs des Acadiens de l’époque. Comme nous le verrons plus loin, il ne cesse de réclamer, par la voix de son journal, que justice soit faite aux Acadiens dans tous les domaines. L’économie agricole La colonisation Le problème de la location des terres subsiste dans l’île jusqu’à la fin des années 1870. De nombreux Acadiens demeurent locataires des grands propriétaires fonciers jusqu’à la désintégration du système. Cela se produit d’abord lorsque certains propriétaires acceptent de vendre leurs terres et, ensuite, lorsque le gouvernement provincial vote le Land Purchase Act en 1875, donc après l’entrée de l’île dans la Confédération. Cette loi oblige les derniers grands proprié- taires à vendre leurs domaines au gouvernement insulaire. Cet achat est financé par un prêt du gouvernement fédéral, obtenu en vertu d’une promesse faite à la population locale lors des négociations en vue de la création de la province, en 1873. Mais en attendant la fin du régime des grands propriétaires fonciers, les Acadiens de l’île se trouvent de plus en plus entassés dans des paroisses surpeuplées avec des fermes trop petites. De plus, certains propriétaires, ou leurs agents, ne tiennent pas à leur louer de nouvelles terres'®. La nouvelle génération ne sait où s’établir. Nous avons déjà vu le rôle important que le Père George-Antoine Belcourt a joué à Rustico dans le domaine de l’éducation ; il en va de même dans le domaine de l’agriculture. Dès son arrivée en 1859, il constate l’ampleur du problème de ses 2245 paroissiens, presque 132