Survint une vague haute, Le bateau a chavire. Au moins d’un mille de la côte Ce cher enfant s’est noyé. Étant au fond des abîmes Ce cher enfant a crie: «Dieu qui mesurez l'abîme, Oh! daignez [me] délivrer. » Oh! l'entendez-vous cher père Ce cher enfant qui vous prie ? Oh! nous le croyions donc guère Qu'il perdrait sitôt la vie. «Et vous, Ô ma tendre mère Qui habitez dans les cieux, Par vos puissantes prières Arrachez-moi de ce lieu. «Ô Vierge, ô sainte ma mère, Oh! daignez me secourir. D'une aussi triste manière, Ô mon Dieu, faut donc mourir! Mon bon ange tutélaire, Vous qui guidez tous mes pas, Offrez à Dieu mes prières Afin qu'il me perde pas. «Mon corps est la nourriture De tous les monstres des eaux, Comme il serait la pâture Des vers au fond d'un tombeau. Mais hélas! qu'importe-t-il Puisque l'âme est assurée, Si des cieux je trouve la porte Ouverte pour y entrer. «En ce moment j'abandonne Tous ceux que j'ai tant aimés. Aux monstres marins je donne Ce corps que j'ai tant flatté. Que je laisse dans mes ondes Mes os, mon sang et ma chaire, 181