42 PAR UN DIMANCHE AU SOIR Summerset Manor de moi-même.» Florence et sa famille ont tout fait pour que la transition se fasse doucement et le plus facilement possible. Par exemple, ils ont installé un téléphone dans sa chambre et pas un jour ne s’est passé sans qu'ils ne s’appellent. De plus, on se rendait souvent la visiter, même plusieurs fois par semaine. Maloré cela, «elle a trouvé ça dur, au dire de Florence, mais elle était une qui s'accoutumait vite. Elle le montrait pas si qu’elle aimait pas ça.» Léah craignait beaucoup que ses enfants se sentent coupables de l'avoir placée au foyer d'accueil. Voici ce qu’elle racontait à Maureen Green venue l’interviewer dans le cadre d’une enquête linguistique : «Quand j'ai venu ici, j'ai bien braillé au commencement. Bien, je voulais pas en faire mine parce que je voulais pas que ma fille s’aperçoive. Mais en cachette, des fois, j'avais les larmes aux yeux. Je lui disais : “Crois-pas là que je m'ennuie. Je suis assez heureuse que tu m'as mise ici.”» Léah était une femme réaliste. Je me rappelle lui avoir demandé Si elle ne trouvait pas regrettable que les aînés ne puissent plus passer leurs derniers jours avec leurs propres enfants, comme cela se faisait autrefois. À cela, elle m’a répondu que les temps avaient beaucoup changé. Autrefois, disait-elle, tout le monde — les jeunes comme les vieux — avait à peu près le même style de vie; ce n'était donc pas difficile pour des gens de plusieurs générations de vivre sous le même toit. Mais ce n’était plus pareil aujourd’hui. Elle donnait en exemple la musique. Selon elle, il ne fallait pas empêcher les jeunes d'écouter leur musique à plein volume comme ils aimaient le faire. Mais une personne de son âge ne pouvait pas s’habituer à vivre dans ce bruit- là; pour le respect mutuel, il était donc préférable de vivre séparé- ment. Malgré tout, Léah s’est vite adaptée à vivre au Summerset Manor. À preuve, elle a composé une chanson pour dire à tout le monde comment elle s’y trouvait bien. Elle était très active, faisant du tricot et de la couture avec sa machine à coudre qu’elle n'avait pas voulu laisser à Abram-Village. Elle confectionnait des articles qu'elle