LÉAH MADDIX, LA CONTEUSE 129 siècles, mettaient en vedette des personnages merveilleux tels l’intré- pide Ti-Jack et ses adversaires redoutables. La grande majorité des contes de Léah provenait de ce répertoire traditionnel, bien qu'elle m'en ait conté quelques-uns qui sont manifestement de source littéraire. Elle conservait évidemment plusieurs des récits de son père. Ses enfants et ses petits-enfants ont beaucoup joui de son talent de conteuse. «Il me semble que c'était à tous les soirs à peu près qu’elle nous contait des contes, m'a confié Marie. Même si je les avions entendus une centaine de fois, je les voulions pareil.» Et d'ajouter Florence : Elle nous les racontait pas rien que les soirs, dans le jour aussi, parce que le monde avait plus de temps qu'ils en avont à cette heure. C’est souvent qu’elle nous contait des contes en travaillant. Elle travaillait puis, nous autres, on s’assisait comme dans la cuisine puis on écoutait. Des fois, elle s’assisait; d’autres fois, elle contait juste ça en faisant son ménage. Ça dépendait. Florence se rappelle que sa mère lui a même déjà récité des contes en plein champ pendant qu'elles cueillaient des pommes de terre : (Quand je venais bien tannée, là, elle me contait un petit conte. Ça, je m'en souviens.» Léah ne semblait pas se fatiguer de répéter pour la centième fois la même histoire, bien au contraire! Il arrivait assez souvent que les enfants du voisinage viennent écouter ses contes, sa porte leur était toujours ouverte. «Îls veniont des grandes demi-journées se promener avec elle pour qu'elle leur conte des histoires, des contes puis toutes sortes de choses, raconte Florence. Elle aimait parler avec les enfants.» Le même scénario s’est répété à Abram-Village avec ses petits- enfants et leurs amis. Gloria et Darlene, filles de Florence, me disaient qu’elles allaient souvent rendre visite à leur grand-mère simplement pour lui demander un conte. Elles amenaient toujours leurs copains et copines. Gloria raconte : (On était parfois des gangs qui y allaient. Ah oui! Mémé aimait vraiment ça. N'importe quel temps! De temps en temps, elle faisait semblant qu'on la tannait, puis en même temps, je sais qu’elle aimait ça pareil. Tu pouvais voir parce qu'elle s'assisait