LÉAH MADDIX, LA CONTEUSE 155 La Petite Cendrillouse. Cet automne-là, la folkloriste Charlotte Cormier, dans son cours de folklore à l’Université de Moncton, nous avait présenté une version de ce conte acadien recueilli à Moncton. À mon agréable surprise, Léah l'avait dans son répertoire. Même si elle était pressée, voyant comment j'étais emballé par ce conte, elle a accepté de me le réciter tout de suite, en autant qu’elle puisse en même temps peler ses pommes de terre et ses carottes. Elle est allée chercher ses légumes et son couteau, et debout au comptoir de sa cuisine, elle m'a raconté l’histoire de la Petite Cendrillouse. À ma grande surprise, le nom de Cendrillouse n’était pas attribué à la belle et gentille petite fille comme dans la version lue en classe ou la version universellement connue. Non, la Cendrillouse de Léah était la détestable et laide fille de la marâtre. Je me demande encore aujourd'hui si Léah ne s'était pas trompée lorsqu'elle m’a raconté ce conte à brûle-pourpoint en préparant le repas du midi. Ce qui me fait toujours douter, c’est qu’elle a raconté ce même conte quelques années plus tard à Léo-Paul Richard, animateur à Radio- Canada, et à cette occasion, la Petite Cendrillouse du conte de Léah était bien la belle fille!8. Ce détail n’est pas tellement important, car Léah nous offre ici un beau conte qu'elle rend bien avec ses savoureuses expressions. On se rendra vite compte en le lisant que c’est une version très différente du conte Cendrillon de Charles Perrault. D'ailleurs, à l’instar de nombreuses versions recueillies en France, la belle rencontre le Prince Charmant non pas au bal, mais plutôt à l’église. Au Poitou, d'où sont partis le plus grand nombre des ancêtres acadiens, le personnage principal du conte se nomme «Cendrouse». La Petite Cendrillouse Une fois, c'était une femme: elle avait marié un veuf, et puis il avait une jolie fille. Et puis la fille de la femme, c'était une vraie cendrillouse, elle était pas belle en toute, “ puie en toute, La femme était assez jalouse [de la belle fille] qu'elle voulait la faire pâtir, (Ça fait, une journée, elle dit [à la belle fille] :