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qui continuait à redouter les jésuites, écrivait : « Il y a par

delà des hommes d’Église de bon savoir que leur zèle de la religion y a portés... Or, quant à présent, il n’est pas besoin de ces docteurs sublimes. plus utiles par deçà à combattre les vices et les hérésies » (1). Pour mieux montrer que la colonie se passerait facilement des jésuites, il publiait que l'abbé Fléché, en vingt-et-un jours, avait baptisé vingt-et-un sauvages.

Après la mort de Henri IV, la régente Marie de Médicis ne se laissa pas illusionner par les statistiques de ces conver- sions indiennes. Elle décida que deux jésuites partiraient

pour Port-Royal (1610), leur accorda un généreux viatique

et les recommanda au chef de la colonie. Les calvinistes refusèrent de donner passage sur leurs bateaux aux deux

missionnaires. Froissée, la reine décréta que les mission-

naires seraient, eux aussi, actionnaires dans la compagnie d’outremer, fondée une couple d'années auparavant pour coloniser l’Acadie : l'argent afflua et, le 27 mai 1611, le Père

Biart, un savant, et le Père Massé, un ascète, débarquèrent :

à Port-Royal. Par la volonté du roi, tout baptisé devenait

sujet français. En arrivant au milieu de leur troupeau, les

deux jésuites constatèrent avec surprise que les baptisés, tout en se vantant « d’être normands » (2), c’est-à-dire français, ne manquaient pas de leur présenter leurs nom- breuses femmes. En fait, les enfants spirituels de Lescarbot connaissaient mieux la langue française que la doctrine et la morale catholiques, et trouvaient plus de charme dans la joyeuse compagnie des Français qu'ils appelaient « oyes

(1) Thwaïtes, I, p. 62. (2) Rochemonteix, I, p. 42.