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avec celle de son premier chef: histoire monotone, le plus souvent douloureuse, mais qu'il importe de connaître pour bien comprendre au prix de quels sacrifices cette maison d'éducation s’est établie. Si cet arbre a porté tant de fruits, c'est qu’il a été copieusement arrosé, surtout au début, de sueurs et de larmes.
Les registres de la première année, 1864, ne mentionnent que dix-neuf élèves, tous de la vallée de Memramcouk ; à la fin de l'année, il y en a plus de soixante, « humbles prémices, écrivait le supérieur, mais destinées cependant à régénérer tout un peuple » (1). Les six professeurs pouvaient donner libre carrière à leur activité ; nombre d'élèves ayant passé par l’école du père Lafrance, on continua immédiatement l'enseignement du français, de l'anglais et du latin. La plu- part des Acadiens ne savaient même pas ce qu'était un collège et ce qu'allaient y faire leurs enfants ; aussi, l'ouverture des cours ne fut-elle marquée par aucune manifestation bruyante. Depuis si longtemps l’histoire acadienne n'’enregistrait que des malheurs et des tristesses, que la joie des paroiïssiens du père Lefebvre ressemblait presque à de la tristesse. « Pourtant ce collège consacrait, comme leur disait le digne supérieur, l'égalité nationale des Acadiens avec les autres peuples ; ce collège est le grain de sénevé biblique plein d’une merveilleuse fécondité » (2).
A la fin de la première année, a lieu une répétition publique des examens. Les réponses si justes et si savantes des élèves surprennent les parents, qui, enfin, comprennent l'utilité et l'importance d’une telle : maison. La seconde année,
(1) Bourgeois, p. 140. (2) Poirier, p. 116.