RUSTICO — PAROISSE ACADIENNE 17
“Nous formons maintenant le noble et grand projet de chasser les Francais neutres de cette province; i] cut toujours été nos ennemis secrets, et ont encouragé nos sauvages a nous couper 1e cou. Si nous pouvons accomplir cette expulsion, cela aura été une des plus grandes actions qu’aient jamais accomplis les Anglais en Amérique; car, entre autres considérations, 1a , partie du pays qu ’ils occupent est une des meilleures terres qui soient au monde. et dans ce cas nous pourrions placer quelques bons fermiers anglais dans leurs habitations”.
Enfin en 1755, 1a tempéte éclata. Pendant les cinq on six années précédentes, comme nous l’avons déja vu, beaucoup d’habitants des établissements frangais de l’Acadie, las des mau- vait traitements et des menaces des gouverneurs anglais, s’élaient échappés et étaient venus joindre les Acadiens de l’Ile Saint-Jean. Mais ce fut surtout pendant et‘ apres cette doulou- 1'euse dispersion que les Acadiens arrivérent en grand nombre dans l’Ile. Maintenant, aux deuX ou trois milles échappés de la péninsule qui vivaient péniblement sur des terres encore mal aména‘gées et ravagées tour a tour par les sauterelles et par les souris, le “grand dérangement” ajouta, outre les habitants de Cobequid échappés en masse auparavant, de 1300 a 1500 nouveaux venus, “dénués de tout”; i1 en vint d’autres encore, dent 230 de Cocagne, et puis encore, cinq cent de Beauséjour et de Tintancare évacués a grande peine par l’abbé Le Guerne. '11s amenérent avec eux beaucoup de bétes a cornes; l’on comp- te plus de 7000 boeufs et vaches et 2000 moutons. Un autre rapport de la méme époque parle méme de 3500 a 3600 habi- tants répartis en cinq parois-ses de l’ile, ayant chacune un mis- sionnaire.
Un an plus tard, vers la fin de décembre 1756, un registre de la. marine a Paris porte que “You a payé environ 60,000 li- vres pour plus de 300 voyages, faits afin d’amener les Acadiens clans l’ile Saint-Jean, et aussi pour leur porter des provisions. Le plus grand nombre de voyages sont de Tatmagouche au port Lajoie, de Cocagne au port Lajoie, de la Baie—Verte a l’ile Saint- Jean, etc.” .
“Je n’ai pu envoyer a M. de Villejoin (commandant de l’Ile Saint-Jean), écrit Prevost, le 26 novembre 1756, tous les se— cours qu’il m’a demandés pour faire vivre cette multitude de réfugiés qu’il a regus depuis un an; il lui en reste encore 1,400, indépendamment de tous ceux qui sont retournés a Miramichi, et de ceux qu’il a envoyés au Canada”. "La misére est grands, confirme 1e gouverneur du Canada. La plupart des habitants sont sans pain. M. de Villejoin a dfi, depuis l’automne, nourrir 1,287 personnes réfugiées”. “II a recu ce printemps 230 de Cocagne; mais il a été obligé de faire passer quelques familles