RUSTICO — PAROISSE ACADIENNE 21 Louis du Nord-Est, les autres de la Pointe-Prime, de Bedeque , tous convergeant vers le port Lajoie ou devaient se faire les embarquements. Le nombre insuffisant des navires retards ?e depart d'un bon nombre jusqu'aux glaces de Fautomne, epo- que si dangereuse pour la navigation dans les parages du golfe Saint- Laurent, ce qui explique la disparition de bien des exiles. II parait meme, d'apres M. de Villejoin , que les derniers depor- tes ne purent quitter l'ile qu'au printemps de l'annee suivante". Wolfe, le hero des plaines d'Abraham, qui avail ete charg6 par Lord Amherst d'une partie de cette sale besogne, ne cacha pas a celui-ci ses sentiments sur pareils actes de brigandage. Il dit: "Vos ordres ont ete executes, (30 septembre 1758). Nous avons fait beaucoup de mal et repandu la terreur des amies de Sa Majeste Britannique dans toute 1'etendue du Golfe, mais nous n'avons rien ajoute a leur gloire". A partir de 1'automne de 1758, quel fut le sort des quatre a cinq mille proscrits de l'ile Saint- Jean, dont la destination, selon les promesses des commandants anglais, devait etre la France ? Combien y parvinrent? Emile Lauvriere , dans "La Tragedie d'un Peupie", ecrit: "En 1759 surtout, les victimes de Boscawen , arrachees de l'ile Royale et de l'ile Saint- Jean, afflue- rent dans tous les ports de la Manche et de 1'Ocean, lamentables epaves humaines du grand naufrage de la Nouvelle- France . En octobre 1758, il en vint a Rochefort; en novembre, a Cherbourg et a Saint- Malo; en decembre, a Boulogne; au debut de 1759, au Havre, a Morlaix, a Dunkerque. Le 6 avril arriverent a Saint- Malo deux paquebots anglais portant 451 prisonniers; a Calais, au Havre, d'autres encore renvoyes d'Angleterre; le 20 avril, a Saint- Malo, 221 encore. Le 8 juin, a Morlaix, toute une cargai- son. A Saint- Malo, le 30 avril, 1,102 se trouvaient rassembles, venus de differents ports. On etait dSborde; on ne savait que faire. A Cherbourg, ou en Janvier 1760, survinrent 147 nou- veaux venus, la petite verole eclata, causant beaucoup de deces. Enfin, le 26 decembre 1762 une lettre adressee aux Commissaires des ports de Prance annonce: "Bien que la paix dut faire supprimer les secours du Roi aux families venues de l'ile Saint- Jean, ils seront cependant continues pendant l'hiver". Une autre lettre du 6 avril 1763, declare que les secours qui devaient cesser le 26 decembre der¬ nier seront continues jusqu'a nouvel ordre. En realite, ce fut a plus de 3000 Acadiens de l'ile Saint- Jean et de l'ile Royale qu'il fallut venir en aide pendant pres de trente ans, et leur entretien annuel depasse 200,000 livres en 1766. En 1772 il y avait encore en Prance 2,370 Acadiens for- mant 626 families, la plupart a Saint- Malo, au Havre, a Cher¬ bourg et a Morlaix; il y en avait aussi quelques-uns a Nantes, a la Rochelle, a Rochefort et a Dunkerque.