RUSTICO PAROISSE ACADIENNE 23

Saint-Pierre du Nord et de Malpec, pourvues chacune d’église et de presbytere, entourées de villages et de vastes champs en culture, d’ou surgissaient ca et la les maisons des habitants avec leurs dépendances, abritant neuf a dix\mille -bétes a cornes, mou- tons, pores, chevaux et animaux de basse-cour; de toutes ces ri- chesses i1 ne restait rien, absolument rien: le fer et la flamme avaient tout dévoré. L’ile St-Jean était redevenue déserte com— me au jour de Champlain et de Cartier. ._

Les Acadiens proscrits de l’ile Saint-Jean comme ceux de la Nouvelle-Ecosse, se trOuverent donc disperses de tous cétés, mais probablement la plus grande partie fut transportée en Europe, soit en Angleterre, soit en France, et c’est de 1:1 que sont partis plus tard, vers 1775, les Acadiens qui s’établirent a Saint-Domingue et en Louisiane. La présence de goélettes canadiennes, qui venaient chaque année parcourir les cétes du Golfe, dut engager un certain nombre de familles a s’embarquer pour le Canada. De 1755 a 1759, les correspondances officielles du Canada mentionnent plus de 1500 Acadiens arrivés ainsi en bateaux. Il n’est guére a douter non plus, qu’un bon nombre 'de fugitifs ne soient allés rejoindre l’abbé Maillard a Malogo— miche. La plupart de ceux qui allérent vivre de chasse et de péche sur les cotes voisines, durent, sans doute, faire cause com~ mune avec le groupe d’Acadiens aux environs de Miramichi les. quels, pressés par la famine, allerent faire leur soumission an . commandant du fort Cumberland (Beauséjour), lorsqu’ ils eurent appris la capitulation de Québec. I] y eut aussi certainement quelques familles, surtout de la paroisse de Malpec, qui échap. perent aux patrouilles anglaises et se réfugiérent au fond (les bois. Apres qu’ils eurent appris 1a nouvelle de la capitulation de Québec en 1759, 1a plupart se rendirent aux Anglais et se soumirent a l’inévitable. Citons encore ce qu’en dit l’abbé Casgrain; “Quelques families expatriées, particuliérement d’an— ciens habitants de l’ile qui y avaient de plus fortes attaches, ne tardérent pas de se hasarder a y retourner. D’autres s’enhardi— rent a les suivre, et l’on vit bientét de petits groupes de ces in- fortunés errer dans les champs dévastés, 01‘1 s’élevaient naguére leurs maisons, leurs villages, leurs églises. Il est inutile d’es- sayer de redire avec quels serrements de coeur ils parcourrurent ces solitudes mornes qu’ils avaient v11 auparavant si animées. Qu’étaient devenus la plupart de ceux qu’ils y avaient connus? Hélas! disparus pour toujours: les uns morts de misére, les autres victimes de désastres inconnus; les survivants relégués sur des plages si lointaines que la vie serait écoulée avant qu ’on en put rien savoir”.

Cependant, aprés sept ans, la guerre arriva a son terme, et un traité fut conclu entre la France et l’Angleterre en 1763.