RUSTICO PAROISSE ACADIENNE 39

avait peu de reputation, ces townships ne furent pas d’abord fort recherchés, attendu surtout qu’il fallait faire des frais pour en tirer parti. Du reste la division était bien calculée, puisque de ces 67 townships ou lots, on a peine ‘3, en trouver deux qui n’aient ou un de leurs c6tés ou une de leurs extrémités bordé par la. mer. Cepen‘dant les familles acadiennes continuaient de défricher a Rustico, a Malpec, a la baie de Fortune, a Cascom— pec, etc. Des familles écossaises fuyant une patrie oil elles étaient vexées par leurs seigneurs en haine ou sous prétexte de leur catholicité, vinrent aussi s’y établir avec autant de con- fiance et sans plus de précaution que les Acadiens. Les uns et les autres demeurerent tranquilles tant que personne n’efit d’int-érét a les molester. Mais enfin les seigneurs ou propriétai- res des lots parurent ou envoyerent des agents; quelques-uns- concéderent aux occupants, sur le pied d’un chelin par arpent en superficie, les terres qu’ils avaient défrichées; d’autres exi- gerent deux chelins, d’autres une demi—piastre. Quelques te- naciers se soumirent a ces deux dernieres impositions et se trouverent bientét obérés et dépossédés en consequence; 11 y en eut qui prirent 1e parti de se retirer immédiatement plutot que de subir une telle imposition; d’autres entrérent en composi- tion avec les seigneurs et eurent leurs terres quittes de toute rente moyennant une somme une fois payée. Quelques-uns aprés avoir perdu tous leurs travaux sur une seigneurie passe- rent sur une autre 01‘1 ils eurent encore la. simplicité de défri- cher, aux. risques d’une nouvelle expulsion. Les familles écos saises nouvellement émigrées profiterent a peine des bévues que leurs fréres avaient faites; plusieurs prirent leurs sfiretés, la plupart ne les prirent pas, de sorte qu’encore aujourd’hui on voit trembler sur cette isle des familles qui craignent a tout moment d’étre évincées et de voir des nouveaux-venus profiter de leurs travaux. Entre les non-propriétaires il y a des Aca- diens qui gagnent 1e Nouveau—Brunswick, et des Ecossais qui traversent au Cap Breton. Dans ces deux provinces ils trou- vent dans les concessions de la couronne des établissements sfirs qu’ils auraient aussi bien pu y trouver vingt ans plus tot, s’ils n’avaient cela de commun que les Ecossais veulent tou~ jours d-emeurer parmi les Ecossais, et les Acadiens parmi les Acadiens. Souvent cette consideration les a aveuglés sur tout le reste. La population de l’isle est estimée en ce moment a 8,000 times, dont la. moitié sont protestants; sur les 4,000 ca- tholiques, i1 y a environ 250 familles écossaises, 1e rests est acadien. La plus parfaite harmonie régne entre les Acadiens et les Ecossais; cependant il ne s’est encore fait aucun maria- ge entre les uns et les autres; chacun tenant aux moeurs et aux. allures de sa nation, aime mieux y chercher un parti, que de s’allier a des étrangers, au risque de vivre dans la discorde.